L’art à l’épreuve du  capitalisme tardif

P r o c h a i n d é b a t 

L’art à l’épreuve du 

capitalisme tardif 

Philippe Cyroulnik, critique d’art (AICA) est né en 1949. Il vit et travaille à Paris. Après avoir été directeur du CREDAC à Ivry-sur-Seine et chargé des expositions à l’ENSBA à Paris, il a ouvert en 1996 le 19, CRAC à Montbéliard qu’il a dirigé jusqu’à la fin de l’année 2015. Direction qu’il a conclue avec l’exposition Retour sur l’abîme – L’art à l’épreuve du génocide dont il est le commissaire avec Nicolas Surlapierre. Il a été professeur associé à l’Université Paris VIII Saint-Denis, membre du Comité technique du FRAC Franche-Comté et est intervenu en temps que membre de jury ou comme critique dans de nombreuses écoles d’art (Besançon, Bordeaux, Cergy-Pontoise, Le Havre, Marseille, Mulhouse, ENSBA Paris, Rouen, Saint Etienne et Strasbourg).

 

 

1/ En introduction, Philippe évoquera rapidement les transformations que le milieu de l’art a connues pendant ces soixante dernières années, avec la massification (y compris scolaire) et l’accentuation des tensions en son sein. La marchandisation de l’art et son insertion dans le capitalisme spéculatif se sont accrues avec l’internationalisation de ce marché, la multiplication des foires et des fondations. La France s’aligne sur ces tendances internationales lourdes, tandis que diminue l’importance du secteur public. Se dessine donc une forme de retour à l’ordre académique, une fin des avant-garde : esthétique des sentiments, réduction de la peinture à la figure, développement du narratif, dépolitisation des pratiques artistiques, etc.

C’est particulièrement cette situation actuelle, celle de la normalisation et de l’inflexion autoritaire, que Philippe décrira : l’art est réduit à un aménagement esthétique, les pratiques et problématiques critiques sont intégrées, les questions de domination (genrée, entre autres) sont dépolitisées, absorbées par le pouvoir, tandis que l’État se désengage et laisse le champ libre à un interventionnisme idéologique. Philippe montrera comment l’exemple des politiques artistiques régionales illustre tout cela. En outre, la crise politique et sociale a un impact sur les manifestations

artistiques.

2/ 

Enfin, Philippe énoncera quelques  règles de conduite et critères de  positionnement souhaitables : Quel art,  quelles pratiques artistiques  aujourd’hui ? Il ne s’agit pas de  promouvoir un nouveau « réalisme

socialiste », ni de se poser en gardien  du tombeau surréaliste. Il ne s’agit pas  de pratiquer l’hagiographie ni l’art  d’illustration, mais de multiplier les approches critiques et les réflexions plurielles. En voici quelques-unes, en  désordre, mais liées entre elles : le  milieu de l’art doit mener la bataille  pour l’égalité des genres ; en art la

forme importe autant que le sujet ; l’art  se déploie entre le désir de changer le  monde et celui de changer la  perception. Il est à la fois avertisseur  d’incendie et memento mori, à la fois  plaque sensible et transformateur de la  vision.