Armand Gatti et le cercle Gramsci Gramsci-Guingouin-Gatti, une conjonction extraordinaire en Limousin
Si le G du logo du Cercle représente naturellement la première lettre du patronyme d’Antonio Gramsci, il a, au fil de sa « carrière » plus que trentenaire, indissolublement incorporé celle des noms Guingouin, puis Gatti. En juillet 2005, Armand Gatti a rencontré pour la première fois le cercle Gramsci en venant tout un week-end à Ligoure fêter les 20 ans du Cercle, avec Hélène Châtelain*. Ce fut un moment mémorable où les salles du château résonnèrent des chants de la Chorale des Résistances Sociales et où ses murs nous permirent d’admirer le film tourné par Hélène à Los Angeles lors de la création dans cette ville de la pièce Chant public devant deux chaises électriques (à partir des derniers moments de Sacco et Vanzetti). Si cette rencontre, permise par Manée Teyssandier et nos camarades de Peuple et Culture Corrèze, fut un moment capital pour la vie du Cercle, elle marquera sans conteste aussi un moment important dans le parcours d’Armand Gatti et de son œuvre. L’automne 2005 fut marqué par la mort de Georges Guingouin, survenue au moment même où Gatti, invité par le Cercle, venait faire une lecture à Gentioux, organisée sur le plateau de Millevaches notamment grâce à un ancien du Cercle, Francis Laveix de Royère de Vassivière. Nous pouvons parler de ce moment en terme de conjoncture extraordinaire, car il marque à la fois un retour créatif de Gatti sur les lieux de son maquis et sa rencontre avec une vie nouvelle foisonnant alors sur le Plateau, laquelle fera beaucoup parler d’elle médiatiquement à partir de 2008 avec l’affaire de Tarnac. En effet, aux lendemains de Gentioux, Gatti écrivit un grand poème en hommage à Guingouin, Les cinq noms de Résistance de Georges Guingouin, poème qu’il confia au Cercle. Grâce aux liens antérieurs noués par le poète avec l’éditeur limousin Jean-Louis Escarfail (éditions Le bruit des autres), le Cercle put co-éditer ce poème. Cette édition fut réalisée en vue d’une lecture mémorable du poème par son auteur devant la ferme de la Berbeyrolle (commune de Tarnac), ferme de la famille Hélie qui, en 1943, avait recueilli Gatti, devenu maquisard-poète dans la forêt éponyme. Après cette lecture, Armand Gatti reviendra très régulièrement dans sa Corrèze. Il sera notamment invité par Pierre Coutaud, maire de Peyrelevade, en vue de fonder un lieu de création international, université véritable ouverte à tous, porteuse d’un culture transformatrice issue des exigences nouvelles de ce siècle. Ce projet ne se réalisera pas en ce lieu et avec Gatti, mais Armand Gatti pourra entreprendre en 2010 avec l’aide d’Henri Roy, maire de Neuvic d’Ussel, sa dernière grande « expérience » qui réunit tout l’été un groupe de 30 stagiaires venant du Limousin, de différents lieux de France et internationaux. Cette pièce, Science et Résistance battant des ailes pour donner aux femmes en noir de Tarnac un envol d’oiseau des hautes altitudes fut un événement majeur dans la littérature et le théâtre selon Olivier Neveux, présent à Neuvic. Celui-ci écrivit à chaud : « Les mots peinent à dire et décrire ce dont plusieurs centaines de personnes furent, cette fin d’été, les témoins. Comme si les catégories qui permettent l’analyse théâtrale s’avéraient sinon fausses du moins vaines, comme à côté. Quelque chose fut, en effet, à nul autre pareil ». Après 2010 et l’expérience de Neuvic, Armand Gatti reviendra fidèlement en Limousin, n’oubliant pas le Cercle. Le 13 novembre 2010, il fut l’invité d’honneur d’une soirée mémorable, salle Jean-Pierre Timbaud, sur le thème « création littéraire et engagement politique ». Lors de cette soirée, son frère en poésie, le toulousain Serge Pey et sa compagne sarde, accomplirent une performance avec des portraits de Gramsci sur le texte de son poème « Graffiti », puis Serge Pey remit à Gatti un bâton de poète, recouvert d’un texte qu’il avait spécialement gravé. En octobre 2012, Armand Gatti vint à Limoges plus particulièrement pour une soirée du Cercle, salle Blanqui, sur « l’actualité de Gramsci », animée par Ramiz Keucheyan. Il participa tout simplement au débat, avec la même attention, le même intérêt et le même bonheur que celles et ceux venus ce soir-là débattre et réfléchir ensemble à propos de la pensée d’Antonio Gramsci.
Francis Juchereau
*accompagnés de Jean-Jacques Hocquard, l' »amiral » de La Parole errante à Montreuil, d’Olivier Neveux, universitaire spécialiste du théâtre d’Armand Gatti et d’Emmanuel Deléage, son assistant franco-américain, habitant Los Angeles.